Moi c’est Marina Torre Liabot, je suis psychologue en addictologie dans un CSAPA, donc un Centre de Soins, d’Accompagnement et de Prévention en Addictologie. Ce sont des structures présentes partout en France, gratuites, anonymes pour ceux qui le souhaitent. On y reçoit des patients souffrant de tout type d’addiction : comportementales ou liées à des substances, que ce soit les plus de 25 ans, les moins de 25 ans, mais aussi leur entourage, souvent oublié. Pourquoi les jeux de casino sont-ils addictifs ? Comme toute addiction, les jeux de casino touchent certaines personnes plus vulnérables que d’autres. Les facteurs d’addiction sont multiples et varient d’un individu à l’autre. Les facteurs de vulnérabilité Il y a cinq grands types de facteurs : 1. Environnementaux : accessibilité aux jeux, pression sociale, culture familiale favorable aux jeux d’argent. 2. Génétiques : certaines personnes sont plus vulnérables à l’addiction. 3. Neurobiologiques : l’addiction modifie les circuits du cerveau (récompense, mémoire, motivation, contrôle inhibiteur). 4. Développementaux : notamment durant l’adolescence où le cerveau est encore en développement. 5. Psychologiques : traumatismes, troubles associés, personnalité, etc. Ces facteurs ne sont jamais isolés. Une addiction se développe souvent quand plusieurs d’entre eux sont déséquilibrés. Les phases du jeu et le cercle vicieux La première phase est celle du « Big Win », le gros gain. Cela déclenche un pic de dopamine, comparable à un shoot de drogue, qui pousse la personne à vouloir revivre cette sensation. Viennent ensuite la répétition, la phase de perte, le désespoir, puis le « chasing » : l’envie de se refaire. C’est un cycle sans fin qui entretient l’addiction. Les biais cognitifs Ce sont des erreurs d’interprétation : croire que le hasard est contrôlable, que le gain dépend de nous, ou encore penser qu’on est proche de gagner après une perte. Le casino lui-même est conçu pour accentuer ces biais : pas de fenêtres, pas d’horloges, déco neutre, bruit constant, alcool gratuit… Tout est pensé pour vous faire perdre la notion du temps et de vous-même. Les signes d’une addiction au jeu – Volonté de se refaire coûte que coûte – Minimisation des pertes (« presque gagné ») – Craving : envie irrépressible de jouer – Poursuite du jeu malgré les conséquences – Perte de contrôle et comportement compulsif – Mensonges et dissimulation des pertes Le repère utilisé en clinique : les 5 C (Contrôle, Craving, Conséquences, Compulsion, Chronicité). Les conséquences sur la vie quotidienne – Rythme de vie déréglé, troubles du sommeil – Mauvaise alimentation, consommation d’alcool ou de drogues – Endettement, vols, problèmes judiciaires – Isolement, conflits familiaux ou professionnels – Troubles psychiques (anxiété, dépression, etc.) Comment aider une personne dépendante ? Il n’existe pas de médicament spécifique, mais un suivi psychothérapeutique est essentiel (TCC, approche systémique, groupes de parole, etc.). On travaille les pensées autour du jeu, les émotions, les comportements, et on accompagne aussi sur le plan social (dettes, logement, justice…) Prévenir l’addiction – Informer sur les mécanismes d’addiction et ceux des casinos – Se fixer des règles claires (budget, durée, personne de confiance) – Ne pas attendre l’addiction pour consulter – Impliquer l’entourage, sortir du jugement, favoriser la communication Message de fin L’addiction est une maladie chronique. On ne guérit pas forcément, mais on peut se rétablir. Le chemin est difficile, souvent ponctué de rechutes, mais avec un accompagnement adapté, on peut reprendre le contrôle sur sa vie. Autres articles qui pourrait vous intéresser :