Les vertus anti-cancer des émotions
Dans la prise en charge des patients atteints de la maladie du cancer, de plus en plus de chercheurs et de professionnels de la santé s’intéressent et s’interrogent quant aux effets bénéfiques que peut avoir une bonne santé mentale sur le rétablissement du cancer. Car oui, contrairement aux idées reçues, nous pouvons être atteint par une maladie et conserver pour autant une bonne santé mentale. Les émotions peuvent avoir de réelles vertus anti-cancer.
Flora Gapin – Psychologue clinicienne d’approche intégrative. Passionnée par l’humain, ses ressources et ses capacités d’adaptation. Je travaille actuellement avec des personnes en situation de handicap psychique. Dans cet article, je vous propose de réfléchir au rôle que peuvent avoir les émotions dans le parcours de soin d’une personne malade du cancer.
Trouver la force émotionnelle pour affronter les moments difficiles dans l’épreuve de la maladie
Dans ce combat de tous les jours face à la maladie du cancer, plusieurs étapes se succéderont. À l’annonce du diagnostic, le choc peut être tellement violent qu’un gel des émotions peut se produire. À ce moment-là, une confusion mentale peut survenir ainsi qu’un sentiment de sidération.
Pour tenter d’illustrer les principaux mouvements psychiques chez la personne atteinte par la maladie du cancer, nous pouvons nous appuyer sur les différentes étapes du deuil. À savoir, le choc, la peur, le déni, la colère, etc… Je ne vais pas pouvoir développer ici, retenons peut être que ce processus émotionnel sera unique. Pour chaque personne, avec un enchainement, des transitions, des allers-retours, des degrés différents dans chaque parcours de soin. Dans chaque parcours de vie.
Dans cette longue traversée que représente la maladie, nous ne pouvons faire l’impasse sur le risque de développer différentes formes de dépression. Des épisodes dépressifs parfois passagés jusqu’à des états dépressifs qui s’installent dans la durée. Dans ce cas là il sera impératif d’en informer son médecin. Celui-ci orientera son patient vers un psychologue et/ou un psychiatre qui pourra proposer une prise en charge adaptée.
Mais alors comment sauvegarder une bonne santé mentale dans ce marathon féroce de tous les jours que représente le combat contre la maladie ?
L’influence de l’esprit sur le corps : les vertus de l’optimisme
Les symptômes de la maladie et les effets secondaires du traitement vont de manière inéluctable malmener le corps et la psyché. En fonction du type de traitement et de l’avancée de la maladie, des effets secondaires peuvent amputer la concentration. De plus, pour lutter contre les effets indésirables des traitements, certaines personnes prennent des médicaments qui vont déclencher de la somnolence. C’est pour cela qu’il est important de bien se connaître, de prendre rapidement conscience de ses limites.
Développer un optimisme flexible au quotidien. C’est être en capacité de prendre du plaisir dans les toutes petites comme les grandes choses de la vie. Tout en prenant en compte la balance bénéfice-risque de chaque situation.
De la même manière, s’engager dans un optimisme actif. C’est continuer d’imaginer des issues heureuses, garder une créativité dans ses projections au quotidien quelque soit la place que peut prendre la prise en charge de la maladie, c’est continuer à se dessiner un futur agréable serein et positif.
Je tiens à souligner que frustration et découragement sont des sentiments désagréables normaux. Ils ont le droit d’être accueilli au même titre que la colère. Autrefois négligée, la colère est aujourd’hui en vogue car si l’on regarde du côté des neurosciences, celle-ci nous apprend que cette émotion sécrète également des hormones utiles pour notre santé mentale. À condition de ne pas se laisser envahir par cette dernière.
Il existe aujourd’hui plusieurs techniques pour se libérer de cette colère, qui peut être saine et efficace sur le plan psychothérapeutique. Dans une logique comportementale, l’optimisme de manière générale nous aide à persévérer. Personne n’arrive à se mettre en mouvement si le but projeté est négatif, inutile ou nocif. Les bienfaits de l’optimisme agissent sur le bien-être, le fonctionnement psychologique, la santé mentale, la santé physique, les performances professionnelles, scolaires et même sportives.
Le stress : déclencheur de cancer ?
Plusieurs études se sont intéressées au lien de causes à effets entre personnalité et développement d’un cancer. En effet plusieurs scientifiques tentent de démontrer qu’une personne ayant un stress chronique élevé est plus susceptible qu’une autre de déclencher un cancer au cours de sa vie.
D’autres ont travaillé autour de l’alexithymie. De fait, des études tentent d’affirmer, que les personnes atteintes d’alexithymie ont un faible potentiel de rémission du cancer.
Les personnes atteintes d’alexithymie ont notamment comme critère principal de diagnostic, une très grande difficulté à exprimer leurs émotions à autrui et présenteraient des facteurs de vulnérabilité au stress importants.
Lorsqu’on souffre d’un stress chronique, qu’ils s’agissent d’un risque de déclencher certains troubles métaboliques comme l’hypertension, de provoquer des dépressions, ou encore d’autres affections n’est plus à démontrer.
Cependant, affirmer que le stress est à lui seul responsable de déclencher une maladie cancéreuse n’est pas encore d’actualité. Je serai prudente dans mes propos et préfère parler d’une origine multifactorielle avec des indicateurs encore difficiles à expliquer à ce jour.
Comment préserver son mental durant l’épreuve de la maladie ?
A l’épreuve de la maladie, s’ajoute l’épreuve du traitement. Alors comment déjouer les pièges de l’isolement, du repli sur soi et du désespoir ?
Les changements du corps inhérents à la maladie vont inévitablement conduirent à un manque d’énergie.
Il est pour autant préconisé de restez physiquement autant actifs que possible.
En effet, garder son corps en mouvement est primordial. Il est évident que l’épreuve de la maladie elle-même juxtaposée à la prise du traitement aura des effets sur le corps. Pour autant il est important de conserver ses habitudes de vie.
On peut citer par exemple, la pertinence des marches quotidiennes, manger le plus sainement possible. Si possible privilégier le vélo à la voiture. Continuer le sport pour ceux qui pratiquaient avant l’annonce du diagnostic en adoptant les séances à l’état de fatigue.
Dans ce cheminement individuel et intime, composer avec la maladie dans les bons et les moins bons jours, demande une grande écoute personnelle.
L’importance de l’entourage
Animal social, l’être humain a besoin des autres pour apprendre, se construire, s’épanouir et se découvrir.
Il y aura des moments, où ce sera très difficile. Pour autant conserver ses activités sociales au maximum est peut être le meilleur des remèdes. Par exemple, pour les amateurs de jeux de société, pour ceux qui fréquentent un club, il faut continuer à y aller. Parfois les capacités de concentration seront misent à rude épreuves, demander à un proche de nous stimuler est salutaire.
Pour ceux qui aiment les animaux, c’est peut être le moment d’évaluer l’impact sur la santé de ce qu’on nomme la zoothérapie. Il existe de nombreux témoignages sur les effets bénéfiques des animaux sur notre santé.
Le travail du deuil dont nous parlions plus haut concerne aussi bien le patient que ses proches.
Il peut être intéressant de rejoindre des groupes de parole pour les proches aidants, afin d’apprendre à mieux appréhender la maladie de la personne de sa famille qui est atteinte d’un cancer. La psychothérapie familiale peut être une grande aide pour permettre à la famille de parler de la maladie et de ses effets sur l’organisation familiale.
Le début d’un travail psychothérapeutique peut être fructueux lorsqu’il s’agit d’améliorer notre habilité à communiquer nos émotions. Car si l’isolement des patients est fréquent, la solitude des proches est à prendre en compte également. Il n’y pas de meilleur remède que de s’armer ensemble face à l’épreuve de la maladie.
Quel que soit le degré de la maladie, je parlerai d’un travail d’apprentissage et de réapprentissage. C’est un nouveau chemin imprévu, injuste et douloureux qui nécessitera une grande force émotionnelle tout au long du parcours de soin mais aussi après le traitement.
Des techniques pour évacuer le stress
Une multitude d’approches sont proposées aujourd’hui pour nous accompagner dans notre quête d’équilibre et de réduction du stress. On peut citer l’approche de la psychologie positive, de la psychologie humaniste, de la Gestalt thérapie pour un travail psychothérapeutique en profondeur. De manière complémentaire, les thérapies psychocorporelles sont intéressantes. En plus du travail de verbalisation, des mobilisations corporelles sont utilisées pour apaiser les maux. Toute la richesse et la grande diversité des techniques de méditation, des techniques de respiration qu’on peut retrouver dans les différents types de yoga, dans la sophrologie ou encore dans la Mindfulness (pleine conscience).
Contre le stress encore le chant est utilisé depuis des siècles, le sport et ses bienfaits ne sont plus à démontrer, d’autres personnes se tourneront vers les arts martiaux, le Tai-Chi, pour d’autres ce sera la danse, la peinture, le modelage ou l’écriture.
On ne peut pas savoir avant d’avoir essayé. L’expérimentation de ces pratiques est aujourd’hui accessible à toute personne en demande.