“Je suis psychologue, sexologue, je travaille à Paris depuis 20 ans en cabinet libéral et je reçois [notamment] des hommes, pour leur santé mentale.”
Santé masculine,  Témoignage

Movember : interview de Boris Guimpel, psychologue et sexologue, spécialisé en santé mentale masculine

“Je suis psychologue, sexologue, je travaille à Paris depuis 20 ans en cabinet libéral et je reçois [notamment] des hommes, pour leur santé mentale.” Boris Guimpel, @borislepsy sur X, a accepté d’en parler dans une interview sur la santé mentale masculine.

“Toutes les problématiques de santé mentale sont traitées pour les hommes, que ce soit l’anxiété, les états dépressifs, la bipolarité… Avec ma spécificité de sexologue, je reçois aussi des personnes qui souffrent de troubles de l’érection, de troubles d’éjaculation, donc toutes les pathologies, y compris aussi pour ceux qui viennent pour des problèmes de couple.”

“On peut faire quelques hypothèses, je n’aurais pas de certitude. De mon point de vue, ça relève vraiment des stéréotypes qui sont transmis dans la société. Juste une petite étude : on s’est rendu compte que même dans les familles où les parents ont un discours égalitaire entre les filles et les garçons, dans lesquelles on ne fait pas de différence entre les filles et les garçons avec nos enfants, il s’avère que les parents peuvent avoir un discours différent de leur pratique. Avec les garçons, ils peuvent avoir plutôt un discours ouvert sur les émotions, mais dans les faits, ils vont plutôt essayer d’être dans un comportement répresseur des émotions des petits garçons, alors qu’à l’égard des filles, ils vont demander « Comment tu vas ? Explique-moi ce que tu ressens, quels sont tes besoins ? ». Donc il y a quand même un discours et un comportement différencié dès le plus jeune âge des petits garçons et des petites filles. En tant qu’adulte, les adultes hommes ont plutôt tendance à réprimer l’expression de leurs émotions et ont du mal peut-être un peu plus que les femmes à prendre en compte leurs émotions, ce qui fait qu’en thérapie, ils ont ces difficultés à accepter leur vulnérabilité émotionnelle.”

“Comme je travaille depuis 20 ans, effectivement j’ai le sentiment, mais c’est vraiment une intuition de clinicien, qu’il y a de plus en plus d’hommes qui viennent me voir, de tout âge, jeunes mais aussi plus âgés, des hommes même de 80, 85 ans qui peuvent venir me voir pour me parler de différentes difficultés, une plus grande ouverture à l’acceptation de l’aide et au dévoilement de soi. Je pense que quand même, la société s’ouvre de plus en plus aux émotions. J’espère croire que nos études en psychologie, en neuroscience, montrent l’intérêt de l’authenticité émotionnelle et le côté nocif de la non-expression. Donc on peut espérer que l’évolution de nos connaissances favorise cette évolution sociétale. Ça peut être un peu optimiste, mais je pense que c’est plus facile maintenant d’accepter que les hommes puissent aussi avoir besoin d’aide pour leurs difficultés émotionnelles.”

“Je pense que la première des choses pour aider un proche, une femme ou un homme, c’est de pouvoir aussi lui dire qu’il y a des solutions, qu’une personne extérieure, un professionnel peut justement, être une bonne écoute, un bon soutien par le fait même d’être extérieur à sa vie. Ce n’est ni sa compagne, ni ses parents, ni des amis, c’est quelqu’un qui est neutre, qui est un professionnel, et qui est à notre service pour d’abord nous écouter. C’est un espace de liberté de parole, mais aussi de solution. Donc ça permet de pouvoir être accompagné par quelqu’un qui ne nous connaît pas et qui est là pour notre propre intérêt.”

“C’est toujours du cas par cas. Ça ne me pose aucun problème, évidemment que des personnes, parfois la compagne d’un homme, le compagnon d’un homme, peut favoriser la prise de rendez-vous pour cette même personne. Effectivement il peut y avoir un déni, il peut y avoir une absence de conscience de son propre mal-être, et que l’extérieur en a peut-être un peu plus conscience. C’est vrai qu’il y a une sorte de conflit entre la liberté individuelle, qui est évidemment importante, et en même temps aussi, le désir d’aider l’autre. Donc c’est une proposition qu’on fait : ‘Voilà j’ai pris un rendez-vous pour toi, tu es libre de ne pas y aller évidemment”, mais c’est vrai que l’entourage nous aide énormément, aide énormément les personnes qui viennent nous voir, parce que c’est un témoin externe.

Peu importe la motivation, dans notre jargon on appelle ça une motivation extrinsèque. Pour rigoler je leur dis : « si vous voulez, je vous fais un certificat pour votre femme, comme ça c’est réglé elle saura que vous êtes bien arrivé”. C’est une motivation qu’elle soit externe ou interne, peu importe, la personne est là, à moi de transformer l’essai, de lui montrer l’intérêt d’être là, pour elle-même et après elle reviendra si j’ai été convaincant afin de mieux l’aider.

On ne peut pas vraiment savoir ce qui se passe dans la tête de l’autre et heureusement, j’ai le sentiment parfois de pouvoir aider une personne, et qu’elle ne reviendra plus jamais. Au contraire, j’ai souvent l’impression de pas aider la personne de manière pertinente, et la personne peut très bien revenir (ça m’est déjà arrivé) un an plus tard, en me disant “Vous ne vous souvenez peut-être pas de moi, mais il y a un an vous m’avez vu une fois, je ne suis pas revenu. Je reviens aujourd’hui, parce que ce, par que vous m’avez dit, j’ai compris qu’on pouvait améliorer mon état.” Donc ça peut venir bien plus tard”

“En sexologie, c’est vrai que très souvent, les hommes qui ont des difficultés sexuelles préfèrent parler avec un autre homme. Comme les femmes qui ont des difficultés sexuelles, préfèrent parler à une femme. Ça reste encore vrai, pour la santé sexuelle, effectivement, c’est comme pour la santé mentale, il y a des stratégies efficaces, validées, par exemple pour les problèmes d’érection. On a beaucoup de données de neuroscience qui mettent l’accent sur les nouvelles données qu’on a sur l’émotion. Les liens entre les problèmes sexuels, et l’émotion sont de plus en plus évidents, démontrés et en clinique, les hommes qui viennent nous voir avec des difficultés sexuelles, contrairement à ce qu’on pourrait penser, elles ne sont pas nécessairement physiologiques, il y a des problèmes physiologiques à des moments, mais elles aussi peuvent être complètement d’ordre émotionnel, et la sexothérapie relève d’une psychothérapie, qui permet aux individus, notamment aux hommes, de mieux gérer leurs émotions et leurs difficultés sexuelles avec eux-mêmes et avec leur partenaire.”

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Spécialisée dans la production et l'écriture de témoignages patients et d'interviews d'associations de patients et de professionnels de santé, passionnée par le secteur de la santé, Delphine a à cœur d'offrir des contenus de qualité qui soutiennent les patients dans leur parcours de soins. Ayant collaboré avec divers professionnels de santé et entreprises du domaine médical, elle travaille à faciliter le parcours de soins du patient.